Californian twerk

Les rivages paisibles de la Californie ne sont plus qu’un lointain souvenir. Les plages jadis immaculées sont tellement jonchées de détritus que l’on se croirait à Marseille. Vers la terre, s’étend la vision cauchemardesque d’une évocation particulièrement réaliste de la cité phocéenne. Partout le chaos.
Aux violentes secousses sismiques se succèdent les vagues meurtrières des tsunamis, charriant lors du ressac les oripeaux de ce qui fut jadis la Cité des Anges. D’ailleurs, d’ici deux jours, Paris Match fera un super titre larmoyant basé sur ce jeu de mot, avec sans doute la silhouette floue du cadavre d’une blonde pour appuyer le propos.

L’heure est donc tout particulièrement grave, ainsi que le twitte @POTUS. A nouveau, L’Amérique a besoin d’un héros pour prouver au monde que 1) ce sont pas les forces de cette terroriste de Mère Nature qui vont broyer un pays aussi puissant qu’il est … puissant et …. volontaire oui, voilà, volontaire, 2) fuck yeah America.

Qui sauvera le pays de l’Oncle Sam ? Qui viendra en aide à la patrie de la liberté ? Qui incarnera le surhomme salvateur au front haut et au poitrail saillant ?

Ah tu fais moins ta maligne maintenant, la faille de San Andreas ! Attends un peu que Dwayne Johnson vienne te voir pour te faire danser la tectonique des plaques. Je t’en foutrais de la dérive des continents !

« –S’il vous plait ?
Un problème Mr Johnson ?
Ouais. Je voudrais pas que vous vous mépreniez sur le film.
Comme je pourrais me méprendre ! C’est un film avec The Rock qui affronte un tremblement de terre à mains nues !
Justement.
Justement ? Mais c’est AWESOME !!!!
Justement non, c’est pas du tout ça…

Madame La Dame ?

Ouhouh ?
Mais… alors… mais vous faites quoi ???  »

Comment un film à quelques millions de boules peut-il autre aussi naze qu’un téléfilm diffusé sur M6 pendant les vacances de Noël ? Comment un mec capable de péter le plâtre qu’il a au bras rien qu’en bandant ses muscles peut-il être réduit à ne rien faire de vraiment bourrin pendant 2h10 ? Pourquoi Paul Giammati s’est retrouvé piégé là-dedans ? Qui est cet enfant mystérieux au visage légèrement familier ? Et surtout, comment Carla Gugino et Dwayne Johnson peuvent-ils être les parents de Alexandra Daddario ?
Je ne suis pas sûre que vous le saurez en cliquant sur la suite, mais bon, vous allez quand même le faire, je vous connais…


Genre, ce mec qui pendouille comme un jambon dans un séchoir pris coeur d’une scène d’action consistant à soulever une voiture à mains nues puis à aller meuler sa tête à la faille de San Andreas, ce n’est pas The Rock. Il est dans l’hélicoptère, à se taper un Volluto.

C’est à dire que « San Andreas » commence très mal avec une première scène supposée nous faire état du héros, comprendre ici The Rock, tout en muscle, mais assigné au pilotage d’un hélicoptère.
Daffuq déjà, à croire que les mecs qui ont écrit le scénario n’avaient pas du tout Dwayne Johnson en tête et surtout, une fois celui-ci choisi, que personne n’a jugé bon de remanier le script.

A quoi ça sert, je vous le demande, quand Dieu et les stéroïdes t’ont donné un physique pareil, d’employer tous ces muscles à tourner un putain de volant


Alors que dans ses grandes œuvres, il est parfaitement capable de ce genre de choses !

Rappel, après un prologue gavé de faux suspens tellement pourris que tu n’as même pas un commencement de début de frisson pour la cheerleader victime de sa sortie de route, l’équipe de The Rock, sauveteur en hélico de son état, est chargée de récupérer la dite blonde dans une crevasse.
Genre de mission taillée sur mesure pour un mec comme The Rock « Alors ma p’tite dame, z’êtes coincée dans votre voiture. Attendez, que je vous arrache la portière, voilà, hop !« .
Mais non, pour désincarcérer la victime, on va plutôt envoyer Tinkiwinkie, le beau gosse un peu demeuré, vous savez, celui qui a les bras épais comme des sandwiches SNCF. Du coup, FORCAYMENT il ne peut pas retenir la voiture qui glisse dans la faille à la force de ses poings. FORCAYMENT, il met tout le monde en danger mais bon, heureusement que The Rock a trop du skill en pilotage, même si tout le monde s’en contrefout. Parce que ce qu’on voulait voir nous, c’était The Rock soulevant la voiture avec le pouce gauche pendant qu’il propulse la fille vers l’hélico avec le gros orteil. Tu as un acteur principal au jeu limité mais foutrement convaincant dans le domaine physique, et tu l’utilises dans un remake de « Oui Oui Chaffeur de Taxi » ? C’EST QUOI TON PROBLEME ?

Déjà, passées ces 10 premières minutes, tu sens que le film en a un gros, de problème et c’est pas fini. Parce que juste après, tu découvres, paf, just like that, un Paul Giammati sauvage s’ébrouant dans un labo de sciences.
Paul Giammati dans le rôle le plus inutile de tous les temps au cinéma, je crois bien, puisqu’il ne sert absolument qu’à lui donner un peu de présence à l’écran, et donc à justifier qu’on lui fasse un chèque à la fin du tournage.
Après je sais pas, si ça se trouve, le producteur c’est son beau frère.
En attendant, Paul Giammati joue le rôle indispensable à tout bon film catastrophe, celui de Albert Mc Science, l’Homme qui Sait, le Grand Jargonnant, la Bibliothèque d’Alexandrie au format epub ambulante.

Son travail consiste ici essentiellement à contribuer au quota de massacre des minorités dans les gros budgets américains.
Car le docteur Mc Science a un assistant coréen, car c’est bien connu, tous ces peuples asiatiques aussi millénaires qu’ils sont mystérieux ont un bonus +28 pour toutes les matières scientifiques. Alors que les noirs, c’est +50 en sport. Cherche pas, c’est comme ça dans tous les films de ce genre.

« –Docteur docteur !
Qu’y a t’il, Kim ? Pourquoi me chanter ce classique d’UFO ?
Le concert de Maiden commence !!! » Il se passe un truc trop über sur l’échelle de la science au cinéma docteur ! Une anomalie magnético-physique fait varier le positron dans le spinal de Vénus. »
On dirait un scénario de film porno produit par le CERN…
En fait, c’est juste que ce truc est en train de valider toutes vos théories ! Vous allez devenir célèbre ! Et riche !
Mouhahaha ! Et je pourrai m’acheter le même fauteuil que l’Empereur Dieu Stephen Hawking !
Avant, il faut tout de même aller vérifier tout ça SUR LE TERRAIN.
OWI mon brave doctorant sous payé…
Jamais payé…
En route, Kim ! Allons sur un barrage, histoire que ta mort soit spectaculaire !
Pardon ?
Je disais, une fois au barrage, c’est toi qui ira à l’intérieur, comme ça tu auras moins de temps pour t’enfuir ! »

Et donc.


« Attention chéri, ça va trancher ! »



Je sais pas vous, mais moi, j’étais tellement surprise que j’en ai oublié de respirer pendant un millionième de seconde. Entre une expiration et une inspiration. Le choc, que voulez-vous.

Après la perte tragique mais héroïque parce qu’il avait tout juste eu le temps de sauver une petite fille avant de passer l’arme à gauche de Kim, Docteur Mc Science rentre à Caltech pour continuer à faire de la science. Là, il explique à une équipe de journaliste qui sert dans toutes les scènes nécessitant une équipe de journalistes et même celles où il n’y en a pas besoin, que certes, il a perdu un homme, mais pas la guerre contre les séismes car son modèle permet désormais de prévoir les tremblements de terre avant qu’ils ne se produisent !

« –SUPAYR ! S‘exclament les stagiaires de BFM.
Genre là, vous voyez ? Y’a de gros points rouges sur la carte. Quand c’est rouge, ça veut dire que c’est très dangereux.
Et quand ça grossit ?
Que c’est encore plus dangereux. Souvenez-vous ce que l’histoire nous a enseigné, tout ce qui est gros et rouge est une menace pour les Etats-Unis : le soleil sur le drapeau japonais, les communistes…
Coca Cola ?
Au lieu de dire des conneries, assistante hispanique, souviens-toi que toi aussi tu appartiens à une minorité, qu’on est qu’au début d’un film catastrophe et que j’ai déjà buté un doctorant au nom de la science !
Sinon, sans vouloir me la ramener, les points sont vraiment de plus en plus gros et de plus en plus rouges.
Par ma barbe, un gros séisme se prépare ! Tous aux abris !!!
Attendez pas de panique, y’a 5 minutes vous disiez pouvoir les prédire à l’ava… »

Et donc une seconde plus tard…

Paye donc ton système de détection des tremblements de terre avant qu’ils ne se produisent. Non seulement son truc ne prédit rien du tout, mais je suis sûre que les systèmes de détection actuels sont à peu près aussi efficaces que son invention révolutionnaire. Pour laquelle un étudiant a donné sa vie, je vous le rappelle.

Mais comme il n’a pas non plus eu ses diplômes pour rien, le docteur Mc Science va désormais justifier sa présence dans le film en passant à la télé.

« –Oui, ici Quitterie* De La Malmoule** en direct de Caltech avec le professeur Mc Science.
Nous vous recevons Quitterie.
Le professeur avait prédit ce séisme deux secondes avant qu’il ne survienne, mais PERSONNE NE L’A ECOUTE et donc des gens sont morts ! Alors maintenant, laissez le donc s’exprimer bande de Philistins ! »

  • ceci est en vrai prénom
    • vous avez remarqué que tous les envoyés de BFM et ITélé ont ce genre de noms totalement oldschool ? Ils viennent d’un élevage dans le XVIe ou bien ?

Le dialogue est aussi absurde que le concept de faire de The Rock un pilote d’hélicoptère. Parce que non, entre le moment où les mecs dans le labo se sont dit « oh ben tiens, attention chérie, ça va peut-être secouer » et le moment où la faille de San Andreas c’est mise à faire un twerk, il s’est passé approximativement 2 secondes pendant lesquelles tout le monde a pris une pose dramatique.
MAIS PAYRSONNE NE L’A ECOUTAY !!!! ça sonne mieux.

Après ce passage éclair sur toutes les plus grandes chaines d’info nationale, le docteur Mc Science pu sombrer dans les abimes du trou scénaristique pour y disparaitre à jamais.

Sans rire, j’ai vu des téléfilms sur M6 mieux écrits que ça.

Mais au moins, on ne peut pas reprocher au film de ne pas entrer dans les canons du genre. Tellement que ça le rend d’ailleurs insipide.
Comme n’importe quel clampin aurait pu tenir le rôle de The Rock, on suit ses aventures assez mollement, pendant qu’il soigne ses plaies et celle de son couple sur fond de catastrophe naturelle. Grosse prise de risque, on va tout de même pas commencer à faire des héros qui sont pas pleins de valeur et dont les problèmes familiaux serviront d’allégorie pour l’unité de la nation dans l’adversité, c’est pas beau cette mère au type latin, ce père à moitié noir et leur fille, blanche comme le facteur ?

Mention spéciale au maire de San Francisco qui décide, alors que les morts, les blessés et les réfugiés se comptent par millions, de suspendre un drapeau géant au Golden Gate Bridge. Le sens des priorités.

Malheureusement, cette crise de patriotisme d’une telle puissance qu’elle pourrait être létale sur un organisme non préparé, déboule tellement comme un cheveu sur la soupe qu’elle n’en est même pas drôle. Pas comme dans « White House Down », mais si, le film avec Channing Tatum et sa fille qui sauvent @POTUS d’une mort certaine rien qu’en brandissant une bannière étoilée à la face d’un avion de chasse. Mais là, entre le guide qui pleurait devant les tableaux de l’incendie de la Maison Blanche par les Anglais, Maggie Gyllenhaal qui survivait grâce « au café et au patriotisme » (citation originale) et la gamine qui se levait à 3h du matin juste pour voir passer Air Force One, le niveau était tel que ça en devenait drôle.
Ici, je me demande juste comment ils auraient pu faire pour poser leur patriotisme sur nos fronts sans que cela ne semble trop forcé.

Voyez, même le pamphlet à la gloire des valeurs de l’Amérique qu’elles sont trop bien est raté. C’est dire le niveau de « San Andreas », qui s’assume comme un téléfilm de qualité moyenne où Kylie Minogue meurt (ignominie) après 21 secondes de présence à l’écran, mais qui n’assume pas d’avoir Dwayne fuckin’ Johnson dans le rôle principal. Du coup, on le voit piloter des hélicoptères, des voitures, des avions, sauter en parachute en mode survival des familles mais bon, pas de quoi se relever la nuit non plus, et quand il décide faire un truc vraiment badass, genre surfer sur un tsunami avec un semi rigide, tu es tellement dégoutée de ne l’avoir vu mettre qu’une seule droite de toute l’heure et demie qui a précédé, que tu contemples la scène sans trop y croire, même quand il manque de se prendre l’Emma Maersk en pleine face.
L’Emma Maersk oui. Si je veux.

Ah quand je pense avoir caressé le doux rêve d’aller le voir cet été avant de décider que « nan, je sais plus« , « oh et puis si« , « non, pas envie aujourd’hui » et que finalement « ok, là je suis motivée ! Il n’est plus à l’affiche… » !

Moralité :
-des fois, c’est bien de rester chez soi pour se taper des margaritas.
-Paul Giammati aurait pu jouer le rôle de The Rock. Sans problème.
-ce film m’a privée de la joie de voir Dwayne Johnson refermer la faille de San Andreas à mains nues. C’est là son plus grand crime.

Cependant, accroche-toi au pinceau je retire l’échelle, ce film a une force. En son sein repose un puissant artefact qui selon la légende possède le pouvoir de générer des tempêtes dans les tasses à café ou, dans d’autres cultures, d’étourdir une abeille.
Cette chose rend ce film plus incroyable que 95% des épisodes de « Game of Thrones ».
Car dans ce film, il y a :

RICKON STARK, le prince punk. Avec une tétrachiée de lignes de dialogues. Zéro grumpy face. L’Elu, le Chosen One de tout un peuple est là, sous vos yeux et il parle.
Ben je sais pas vous mais moi, ça a suffi à me consoler de tout le reste.

Note :

Nul

Un commentaire Ajoutez les votres
  1. Merci de me confirmer que ça avait l’air bien naze ! Ça m’évitera de perdre deux heures de ma vie ! :p

  2. Petite correction : C’est White House Down avec Channing Tatum et sa fille qui affronte un avion de chasse avec la bannière étoilée. La Chute de la Maison Blanche c’est celui avec Gerald Butler qui sauve Aaron Eckart !

  3. @ Melloctopus : merci, j’ai confondu les 2 :/ Je m’en vais corrigé ça. D’ailleurs, le film avec Gerard était meilleur que celui avec Channing Tatum. Enfin, meilleur…. Je me comprends…

  4. Le côté patriote américain fuck yeah murica save the world est quand même bien présent dedans, mais un chouïa moins bourrin ! x)

  5. Quitterie*ceci est en vrai prénom

    Confirmé, celle qui le portait sur nos bonnes terres de France, fut au temps glorieux du MODEM en pointe avec François B pour héros, blogueuse en chef d’un site pro MODEM, malheureusement pour je ne sais plus quelle sombre raison elle dut quitter son blog, et bien sûr François B connu le sort que l’on sait en 2007.
    On me dit dans l’oreillette qu’elle s’appelle en fait: Quitterie de Villepin et est la nièce de … tout un programme mais cela est une autre histoire.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *